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dimanche 4 septembre 2022

Musée Guimet - Musée national des Arts asiatiques - Cambodge




Le musée Guimet c'est "LE" grand musée des arts asiatiques à Paris, place d'Iéna. J'y étais allée... il y a bien, bien, longtemps... et j'avais toujours l'envie de retourner à la suite de mes voyages en Asie du Sud-Est je ne l'avais jamais fait. C'est grâce à cette gratuité que la plupart des musées parisiens offrent les premier dimanche de chaque mois que je me suis décidée à y retourner. 

Et quelle merveille. Évidemment du fait que j'ai voyagé dans tous ces pays asiatiques je comprends beaucoup mieux ce qui se présente sous mes yeux.

Il a été rénové en 1997, conçu, lors de sa rénovation comme un grand centre de la connaissance des civilisations asiatiques au cœur de l’Europe, il présente aujourd'hui, regroupée dans un espace qui leur est dédié, l'une des plus complètes collections d'arts asiatiques au monde.
 
Ok il s'appelle désormais officiellement le "Musée national des Arts asiatiques - Guimet", abrégé en MNAAG, appelé encore couramment musée Guimet. Pour moi comme le musée Branly Jacques Chirac restera toujours le musée Branly, le "Musée national des Arts asiatiques - Guimet" restera toujours pour moi le musée Guimet.


Musée Guimet (MNAAG)
6, place d'Iéna
75016 Paris
Site web: https://www.guimet.fr


 

Histoire

Le musée s'est constitué à l'initiative d'Émile Guimet (1836-1918), industriel et érudit lyonnais. Grâce à des voyages en Égypte (le musée de Boulaq l'inspirera pour la muséographie de ses futurs musées), en Grèce, puis un tour du monde en 1876, avec des étapes au Japon, en Chine et en Inde, il réunit d'importantes collections d'objets d'art qu'il présenta à Lyon à partir de 1879.

Par la suite, il se spécialise dans les objets d'art asiatiques et transfère ses collections dans le musée qu'il fait construire à Paris par Jules Chatron et qui est inauguré en 1889. Le bâtiment est réalisé avec les mêmes plans que le musée de Lyon. 

En 1927, le musée Guimet est rattaché à la Direction des musées de France et regroupe d'autres collections et legs de particuliers. C'est désormais la plus grande collection d'art asiatique hors d'Asie.


Une petite queue en ce dimanche, mais très petite. A l'entrée il y a un ralentissement induit par des contrôles de sécurité. Afin d’assurer la sécurité des visiteurs, le MNAAG applique les mesures préventives décidées par le gouvernement pour les administrations publiques.

Il y a trois étages. 
A l'entrée un cavalier afghan et une femme assise nous accueillent.


En allant dans ce musée, j'ai quand même mes préférences (car il est vraiment IMMENSE !),
 
La collection de l'Asie du sud-est l'une des plus riches du musée, et est, pour sa majeure partie, consacrée à la statuaire et au décor architectural de l'Empire khmer (9e – 13e siècle).  Et moi je suis une passionnée d'Angkor.

Le musée est particulièrement riche en ce qui concerne le Cambodge et le Vietnam indianisé (Champa) et j'ai été très déçue de ne pas être arrivée à me rendre dans la région Champa lors de mon voyage au Vietnam.  

Mais il comporte également des oeuvres permettant d’offrir un large panorama sur les arts de la Thaïlande, de l’Indonésie, du Vietnam sinisé, ainsi que sur ceux de la Birmanie et du Laos.
 
Un de mes but est de voir le fameux fronton du temple khmer de Banteay Srei (où je suis allée), l'un des deux qui avaient été volés par André Malraux. L'un était au musée de Phnom Penh avant d'être remis à sa place, et le deuxième... il est ICI !


La création du département d’art de l’Asie du Sud-Est résulte de la réunion de deux grandes collections d’art khmer, entre 1927 et 1931 : 

→ celle du fonds ancien du musée d’Emile Guimet avec l’ensemble d’art du Cambodge réuni par Etienne Aymonier (1844-1929) 
→ et celle de l’ancien Musée Indochinois du Trocadéro dont Louis Delaporte (1842-1925) avait été l’initiateur et le conservateur. 

Ces collections furent complétées jusqu’en 1936 par les envois de l’Ecole française d’Extrême-Orient dont fit partie le fronton de Banteay Srei.

L’ensemble de sculptures khmères permet d’illustrer les grandes périodes de l’art du Cambodge, des origines à nos jours et n’a pas son équivalent en Occident. Il est le reflet de la contribution française à la connaissance de cette prestigieuse civilisation. 

Le Harihara de l’Asram Maha Rosei (VIIe siècle), le fronton de Banteay Srei (vers 967), ou la tête de Jayavarman VII (fin du XIIe-début XIIIe siècle) font partie des chefs-d’oeuvre de la sculpture mondiale.

Et quel bonheur en entrant

Partie supérieure de la restitution de la tour du Bayon

Le Bayon est le temple-montagne de Jayavarman VII qui régna à la fin du 12e siècle et au début
du 13e siècle, le dernier grand roi de l'empire khmer.

Le temple aux deux cents visages.



 
La « Chaussée des Géants »

A l'entrée du musée Guimet, dans la première salle, impossible de manquer ça.


Preah Khan, Angkor - fin du 12e siècle – début du 13e siècle
Grès - mission Louis Delaporte (1873-1874)

Dans le sanctuaire de Preah Khan (l'Epée Sacrée), cet impressionnant groupe ouvrait la voie
processionnelle menant le fidèle à la porte extérieure du complexe en évoquant
le mythe du barattage de l’Océan de Lait.



Preah Khan - Photo de moi (2007)

Les rampes sculptées représentent le Naga, trait d'union entre le monde des hommes et le monde des dieux. Il est à la fois divinité des eaux et arc en ciel qui après la pluie relie ciel et terre.

Il est fermement tenu par des divinités (les devas) et des démons (les asuras). Ici vient s'ajouter une autre légende sacrée : le barattage de la mer de lait. Dieux et démons en quête de la liqueur d'éternité que recèle l'océan, remuent les eaux avec une montagne, le Mandara. ils sont un instant unis dans la recherche du trésor des trésors.


Preah Khan - Photo de moi (2007)

Au musée c'est un fragment, plutôt : la tête du Naga et deux divinités qui portent son corps.
Il a été "volé" par nos archéologues en 1874 sur le site de l'un des temples d'Angkor, le Preah Khan.


« Le fragment rapporté avec d'autres statues remarquables provoqua l'engouement du public lors de l'exposition universelle de 1878. Les visiteurs découvraient alors un art monumental qui avait su donner aux pierres une douceur de chair et aux visages un sourire qui ne se retrouve en Occident que dans le meilleur de l'art roman ».

« Placées de part et d’autre de la chaussée permettant de franchir les douves circonscrivant l’enceinte extérieure du monument, deux longues théories de géants, d’aspect farouche (les asura) ou paisible (les deva), soutiennent le corps d’un gigantesque cobra polycéphale.

Ces ensembles majestueux peuvent être considérés comme des représentations de divinités protectrices secondaires aux abords des sites où on les rencontre.

Bien que spécifiquement hindou, en ce qu’il se rapporte à l’un des avatars du dieu Vishnu, le thème auquel se rapporte cet ensemble est celui du « barattage de l’Océan de Lait ».

Asura (démons) et deva (divinités) tirent alternativement sur le corps du cobra censé être enroulé autour du mont Mandara afin de le faire pivoter. L’agitation ainsi produite dans les profondeurs de l’Océan de Lait fera émerger divers trésors, dont la liqueur d’immortalité (amrita) ».




Le Naga est un génie-serpent, venu tout droit de la mythologie indienne et
omniprésent dans les temples cambodgiens. Il symbolise les eaux et les richesses souterraines.



J'ai un grand intérêt dans ce musée, c'est de pouvoir voir des oeuvres qui étaient dans des endroits où je n'ai pas pu me rendre, ou dans des endroits où il ne reste... plus rien du tout, que des pierres par terre. 



Phnom Kulen

Et Phnom Kulen, je n'y suis pas allée ! 1h 30 à 2h en voiture de Siem Reap. 
Un petit massif qui culmine à 487 m. Phnom Kulen est le lieu où part la plupart des sources qui alimentaient jadis la grande cité d’Angkor Thom ainsi que Angkor Vat.

Une légende locale raconte que c’est dans ce décor naturel sublime, que le roi Jayavarman II (802-850) aurait proclamé la fondation du royaume d’Angkor.

L’endroit le plus remarquable reste des milliers de sculptures tapissant le lit de la rivière sacrée.




  
Phnom Da

On dit que cette région a peut-être été le cœur de l'empire Funan et elle est souvent désignée comme "le berceau de la civilisation khmère". Dès le 3 ème siècle, des émissaires chinois mentionnèrent l’existence du royaume Funan dans la zone méridionale du Cambodge actuel. Il céda vers le 6 ème siècle sous l’expansion du royaume Tchen-La.

Le Phnom Da est à environ 24 km à l’est de la ville de Takeo. Le temple Prasat Phnom Da date du au 6 ème siècle après JC. Il fut le principal centre religieux et culturel d’Angkor Borei, dernière capitale du Funan. La plupart de ses statues ont été déplacées au Musée national de Phnom Penh. Le 1er septembre 1992, ce site a été ajouté à la liste indicative du Patrimoine culturel mondial de l’UNESCO. 

 


 
Voilà ce qu'il en restait du Phnom Da quand j'y suis allée, en haut de la colline,
un temple en forme de tour carrée de latérite rouge.



Il est représenté avec quatre visages pointant vers les quatre
points cardinaux symbolisant ainsi son omniprésence.





Beng Melea

Il s’agit de l’un des temples les plus mystérieux de la cité d’Angkor. Il repose tel un trésor caché au milieu d’une jungle envahissante. A 72 km au nord de Siem Reap, et à 6,5 km au sud-est de Phnom Kulen.



Cette statue je l'ai photographiée parce que le temple de Beng Melea,
j'y suis allée, et je peux vous dire qu'il n'y avait plus que des gros blocs
de pierre à terre et quelques frontons sculptés, tombés à terre.
  
Ben oui, à Beng Melea !



Alors que Bouddha était en méditation, un violent orage éclata. Les eaux tumultueuses menaçaient de l'emporter. Le cobra Naga sortit alors du fond des abysses, se lova autour du sage pour le réchauffer et déploya sa tête au-dessus de lui.

Bouddha est rarement représenté recouvert par le serpent. Le plus souvent il est assis sur ses anneaux, la tête protégée comme par un parapluie vivant.



Banteay Srei

Banteay Srei signifie "La citadelle des femmes".

Banteay Srei, un temple en grès rose, l'un des plus beaux d'Angkor. Lorsque Banteay Srei a été redécouvert pour la première fois, on pensait qu'il remontait au 13e ou au 15e siècle en raison du raffinement de ses sculptures. Cependant, des inscriptions retrouvées plus tard sur le site situent sa consécration très précisément le 22 avril 967 après JC. 

Le Banteay Srey est devenu soudainement célèbre en 1923 suite à une célèbre affaire de vol d'art perpétré par... André Malraux.

Mais où se trouve ce fameux fronton du temple Banteay Srei qui avait été volé par André Malraux ? 
J'ai demandé aux surveillants de musée dans les salles, et personne ne voyait à quoi je faisais allusion. 

Et voilà que c'est d'un coup que je suis tombée dessus. 
Il était complètement caché derrière le gros socle supportant la tour du Bayon à l'entrée.


Une histoire de vol

En 1923 André Malraux a 22 ans. Dans le but de combler de grosses pertes d'argent sur des actions mexicaines, il décide de partir avec son épouse, Clara Malraux, et son ami d'enfance, Louis Chevasson, en Indochine dans le but d'y voler des statues et de les revendre. Pour obtenir une mission archéologique gratuite, il prétend faussement qu'il suit des cours à l'École des langues orientales, qu'il souhaite visiter le site de Banteay Srei alors oublié, et s'engage à ne prétendre à aucun droit de propriété personnelle sur les œuvres d'art découvertes...

Dans le temple Malraux et son compagnon Louis Chevasson découpent à la scie une tonne de pierres sculptées et quatre grands morceaux de bas-reliefs qu'ils emballent, emportant quatre devatas d'un linteau du Banteay Srey, pour les revendre à un collectionneur. Alertées des projets de l'expédition, les autorités ont flanqué celle-ci de quelques indigènes. Les voleurs finissent par être arrêtés à leur arrivée à Phnom-Penh, le 23 décembre 1923, et assignés à résidence à l'hôtel Manolis dont ils ne pourront plus payer la note au bout de quatre mois. La nouvelle met du temps à filtrer en France.

André Malraux fut condamné, le 21 juillet 1924, à trois ans de prison ferme et cinq ans d'interdiction de séjour, et son ami Louis à un an et demi. Clara Malraux, a été censée n'avoir fait que suivre son mari et n'a pas été inculpée. En appel, le 28 octobre 1924, la peine de Malraux est réduite à un an et huit mois avec sursis, sans interdiction de séjour, celle de son ami à huit mois, également avec sursis.

Malraux dira avoir été "subjugué pas la grâce de sa dignité".


La nature de ce grès a permis au monument de très bien résister au temps, et il a été démonté puis remonté dans d'excellentes conditions, sur place. Mais certaines parties n'ayant pu être remontées par manque des assises originelles sont encore à terre exposées au passage des touristes.

Le premier fronton est resté au Cambodge.
Un deuxième fronton sera donné à la France en remerciement du travail effectué par ses archéologues. 
Il se trouve aujourd'hui depuis 1936, au musée Guimet.


Fronton du porche ouest du gopura III. Est de Banteay Srei
Style de Banteay Srei, vers 967.
Grès, H. 1,95 m de hauteur sur  2,69 m de largeur 



Le fragment visible au musée Guimet montre la belle apsara Tilottama, sous un arbre dont elle était en train de cueillir les fleurs odoriférantes, lorsqu'elle est surprise par les démons Sunda et Upasunda. 

Les dieux ont délégué la belle afin de donner l'occasion à ces deux démons, deux frères qui voulaient dominer le monde, de se détruire mutuellement et ainsi mettre fin à leur démoniaque pouvoir. Elle réussit à sauver le monde de ce conflit grâce à sa beauté. Ils se sont battus pour elle, jusqu'à ce qu'ils s'entre-tuent. L'ordre est ainsi revenu.



Jayavarman VII

(1181-1201 - ou 1218)

La tête présumée de Jayavarman VII, style du Bayon (Angkor)
Une autre pièce importante du musée que je voulais absolument voir.



Cette tête, bien que dépourvue d’insignes de royauté et de toute parure, est celle d’un souverain : Jayavarman VII.
Ses lèvres affichent le célèbre « sourire d’Angkor ».


 
Jayavarman VII est le dernier grand roi de l'empire khmer.
Né à une date inconnue (avant 1150), mort en 1218 ou 1219.
Il régna de 1181 à 1218 ou 1219 (?).

Le règne de Jayavarman VII fait suite à une période de troubles s’achevant en 1177 par le sac d’Angkor par les Chams.

Le règne de Jayavarman VII voit le retour des Khmers au Cambodge et à Angkor. Après un long exil, le glorieux roi reprend ces territoires.

Sans doute en raison d'une perte de confiance dans le shivaïsme qui n'avait pas su protéger son peuple, il se tourne vers le bouddhisme mahayana, qu'il instaure comme religion d'Etat.

Ce changement a reçu une expression suprême dans de gigantesques programmes architecturaux. L'art est devenu le véhicule d'un bouddhisme spécifiquement cambodgien dans lequel le roi représentait l'incarnation de la dévotion. 

La campagne de construction de Jayavarman VII a eu lieu à un rythme effréné ! Des centaines de monuments ont été construits en moins de 40 ans. Les œuvres de Jayavarman VII comprennent les célèbres visages de pierre Bayon : 200 visages ornent les 54 tours du Bayon.
 

 

Ce changement de religion a engendré une nouvelle esthétique, et explique la sobriété de cette tête de grès.

Le souverain apparaît très humble, les yeux baissés, apaisé. 
Le « sourire d'Angkor », doux et énigmatique, flotte sur ses lèvres.

Cette sculpture appartient au style du Bayon (fin 12e / début 13e siècle), dans lequel les sculpteurs abandonnent le canon idéal de jeunesse et de beauté quelque peu impersonnel des époques antérieures, pour leur préférer un style plus naturaliste, plus dépouillé, au modelé plus sensible.

Ils adoptent un style terrestre et humain, s’inspirant parfois de la physionomie du roi ou de ses contemporains. 

Pas de parure ni d'insignes de royauté : la puissance du monarque de la reconquête s'impose d'elle-même par la pureté des lignes de son crâne et l'harmonie sereine qui se dégage de la pierre. 

Le roi est ici représenté à l’âge mûr, le visage quelque peu empâté, et méditant en toute humilité, les yeux baissés. 

Cette oeuvre montre une grande expressivité, bien que toute en retenue, traduisant par la dévotion et la sérénité de l’âme la grandeur royale. 

Un des chefs-d'œuvre de l'histoire de la sculpture, symbole d'une période brillante qui prendra fin au milieu du 13 ème siècle, avec le retour du shivaïsme.
 

 
 
  
Mes autres découvertes


     
 
 




 
Angkor Thom est la cité royale construite par Jayavarman VII.


 



 
 
Dans l'hindouisme les Apsaras sont des femmes, toujours jeunes et très belles, qui dansent à la cour d'Indra. Elles naquirent pendant le barattage de l'océan et elles sont très nombreuses puisqu'on en dénombrerait 35 millions.

L’art khmer puise ses origines dans l’art indien et évoluera en art du Bayon.
Les apsaras introduisèrent une nouvelle souplesse dans l’architecture khmère.




Apsara à Angkor Vat

1 commentaire:

Roger Barthas a dit…

Très bel article, bien documenté! Bravo